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Hélène Cadou
Hélène CADOU (1922-2014)
Hélène Laurent est née à Mesquer (Loire-Atlantique). Après des études de philosophie, elle rencontre le poète René Guy Cadou dont le recueil Les brancardiers de l'aube, publié en 1937, l'a profondément bouleversée. Elle l'épouse en 1946. Après la mort de René Guy en 1951, elle se consacre à son tour à l'écriture poétique avant de devenir conservateur de la demeure du poète à Louisfert-en-Poésie. Celle qui inspira à René Guy Cadou quelques-uns des plus beaux poèmes de la littérature française est aussi une grande voix de la poésie.
J’ai vu des paysages…
J’ai vu des paysages refermés sur leurs forêts
Des nuits profondes comme des citernes
Des arbres qui taisaient dans l’ombre leurs secrets
Mais aujourd’hui les fenêtres du ciel
S’ouvrent sur une province inconnue
Où les blés montent plus haut que les étoiles
Où les fontaines au coin des rues
Fleurissent comme des lampes familières.
Je goûte un pain meilleur que le silence
Et j’épelle les jours simplement pour le bonheur.
Qui parle de retour ?
Il faut saluer la vieille terre
Et pour le grand voyage préparer son cœur
Avant l’éclatement final des saisons.
J’ai peur d’être charmé par un reste d’aurore
Et je retarde l’heure verticale
Où je devrai sauter toute lumière éteinte
Dans l’eau brûlante du Seigneur
Mais je crois au port
Comme l’abeille à la ruche
Comme l’aile aux lois qui la portent
Car Dieu sur l’avenir allume l’espérance
Mieux qu’un million de phares sur la mer.
Cantate des nuits intérieures
Editions Pierre Seghers, 1958
Ce printemps trop grand pour moi…
Ce printemps trop grand pour moi
Me fait peur dit le vivant
Il m’emporte à plein poumons
Avec ses arbres son ciel
Ses débordements de source
Laissez-moi dormir encore
Un instant un seul instant
Pour que je compte mes bras
Mes yeux mes jambes
Et le nombre de mes doigts
Avant de saisir le jour
Et d’y fonder ma demeure.
Le livre perdu,
Editions Rougerie, 1997
Peinture de He Jiaying
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